Mental Health Care Building du Parkwood Institute
Mental Health Care Building du Parkwood Institute, London (Ontario),
Parkin Architects Limited et Architects Tillmann Ruth Robinson en consortium
Photo : Studio Shai Gil

La firme torontoise Parkin Architects a mis sur pied son propre système d’évaluation post-occupation. Voici pourquoi et comment.

En 1984, une étude publiée dans la revue Science par le chercheur Roger Ulrich – aujourd’hui professeur d’architecture – établissait que les patients occupant une chambre avec vue sur de la végétation plutôt que sur un mur de briques passaient moins de temps à l’hôpital à la suite d’une chirurgie.

« Il a consacré des années de sa vie à prouver quelque chose qu’on savait tous intuitivement », analyse Robin Snell, architecte principal de la firme torontoise Parkin Architects, qui a collaboré avec lui à un projet de centre hospitalier en Colombie-Britannique. « Comme praticiens, nous devons aussi nous appuyer sur la science pour établir que certaines décisions de conception étaient les bonnes. C’est notamment le but des ÉPO. »

Spécialisée dans les infrastructures de santé, Parkin Architects a mis sur pied son propre processus en matière d’ÉPO. Adepte de la conception fondée sur les données probantes – ou evidence-based design –, elle en mène de façon informelle depuis la fin des années 1990, explique Robin Snell. Faute de ressources, l’équipe se limite à tester l’implantation d’un maximum de trois idées différentes au moyen d’un questionnaire que le personnel soignant du bâtiment remplit en ligne.

Par exemple, à l’hôpital Providence Care de London, en Ontario, les architectes de Parkin ont imaginé un dispositif pour éviter de dresser une vitre de sécurité devant le poste de soins infirmiers. Il s’agit d’un « refuge » d’urgence, où le personnel peut se mettre à l’abri d’un patient agressif. Cette initiative n’a toutefois pas fait l’unanimité, selon ce qu’a révélé l’ÉPO, certains employés mettant en doute la pertinence de l’aménagement. « Ça avait l’air d’une bonne idée, mais visiblement, il faudra retravailler notre concept. »

Bien que limité, le processus maison s’avère utile, dit-il. Les résultats des ÉPO sont inscrits dans une base de données afin de servir dans les projets ultérieurs de la firme. « Il faut beaucoup de temps et d’efforts pour réaliser les ÉPO, et nous le faisons sans grande récompense, sinon celle d’acquérir un peu plus de notoriété et d’améliorer nos futurs projets. Mais le processus fait de nous de meilleurs concepteurs, car nous apprenons sans cesse. » C’est déjà cela !


Vers une norme canadienne pour les ÉPO ?

Les évaluations post-occupation (ÉPO) pourraient-elles devenir la norme au Canada ? L’hypothèse est particulièrement pertinente pour les établissements de santé, dont l’incessante évolution technologique force l’innovation architecturale, mais engendre aussi des coûts importants à chaque mise à niveau. Chapeauté par l’Association canadienne de normalisation (CSA), un comité technique pancanadien formé notamment d’architectes, de chercheurs et de représentants gouvernementaux (dont le ministère de la Santé et des Services sociaux québécois) examine différents moyens de standardiser les ÉPO menées dans les établissements de santé. Éventuellement, le fruit de leur travail pourrait déboucher sur un standard encadrant les ÉPO – la norme Z8003 –, mais le comité ne statuera pas sur cette question avant l’été 2017, indique la CSA. 


Ressources incontournables

• Spécialiste de la psychologie sociale, la chercheuse canadienne Celeste Alvaro se consacre à l’étude de l’impact de l’environne­ment bâti sur le comportement humain, en plus d’enseigner comme professeure auxiliaire au Département d’architecture de l’Université Ryerson de Toronto. En 2016, elle a copublié un ouvrage d’une concision et d’une utilité remarquables, notamment pour les architectes : A Planning Guide for Post Occupancy Evaluation: The ABCs of POEs.

• La chercheuse Jacqueline Vischer a passé plusieurs années à peaufiner un questionnaire d’enquête pour les évaluations post-occupation

• Assessing Building Performance, l’ouvrage phare des chercheurs Wolfgang Preiser et Jacqueline Vischer, peut aussi être consulté en ligne.

• Le Britannique Nigel Oseland est l’auteur d’un guide de bonnes pratiques pour le compte de l’organisme British Council for Offices (BCO) : BCO Guide to Post-Occupancy Evaluation. Il n’est pas disponible en ligne, mais on peut le commander ici.