Illustration : Pierre-Paul Pariseau

Lorsque le gouvernement du Québec lance un appel d’offres pour un projet impliquant des architectes, la minceur du budget affiché fait souvent sourciller les responsables des firmes. La question se pose : l’expertise des architectes de l’État est-elle mise à contribution lors de la rédaction de ces appels d’offres ?

« Les architectes du gouvernement ne dessinent plus, ils ne rêvent plus », se désole d’entrée de jeu Line Lamarre, présidente du Syndicat des professionnelles et professionnels du gouvernement  du Québec (SPGQ), qui représente 20 000 membres de la fonction publique, dont 60 architectes. Afin de répondre à  nos questions, elle s’est entretenue en privé avec deux architectes à l’emploi du gouver­nement québécois. Ces deux membres du SPGQ ont demandé l’anonymat par peur de représailles de la part de leur employeur.

Selon ce que le syndicat a pu récolter comme information, l’expertise des architectes de l’État est peu mise à contribution lors de la rédaction d’appels d’offres pour des projets immobiliers.

Certes, il arrive que ces architectes aient l’occasion de commenter ces appels d’offres, mais leur opinion aurait une influence limitée sur le contenu. Ce sont des chargées et chargés de projets qui sont responsables de l’élaboration des appels d’offres dans la fonction publique. Mais selon le SPGQ, il n’y a pas d’architectes parmi ces personnes. Celles-ci possèdent « une formation technique ou universitaire dans un domaine connexe à la gestion de projet ou à la construction », peut-on lire dans les Règles administratives – Program­me de financement des infrastructures  et autres subventions liées à des projets d’immobilisation de 2021. En collaboration avec l’architecte, elles « supervise[nt] l’exécution des travaux et règle[nt] différentes problématiques auprès  des entrepreneurs ».

Que font les architectes de l’État ?

Les architectes à l’emploi de l’État québécois « assurent la coordination, la présentation et la gestion des projets immobiliers en vue de la construction ou de la rénovation d’immeubles et d’édifices publics. Ils et elles peuvent également réaliser des plans en fonction de facteurs architecturaux et fonctionnels précis et veiller à leur application au moment de l’exécution des travaux », peut-on lire dans un affichage de poste d’architecte publié  au printemps 2021 sur le portail Carrières du gouvernement du Québec.

Parmi les autres tâches décrites dans l’annonce, on compte l’élaboration de normes architecturales pour différents types de bâtiments publics (écoles, logements sociaux, hôpitaux, édifices patrimoniaux, établissements de détention et autres)  et la coordination de projets touchant  à la gestion du parc immobilier du gouvernement au Québec et à l’étranger.

Une question d’effectif ?

En juillet 2021, l’Ordre des architectes du Québec recensait 724 architectes travaillant dans les secteurs public et parapublic,  soit environ 17 % de ses membres.

Selon les données du SPGQ, le nombre d’architectes de l’État est en baisse cons­tante depuis quelques années. En 2021, elles et ils ne sont plus que 60 alors qu’en 2005, on en comptait 91. C’est en 2009 et  en 2010 que le SPGQ a perdu le plus grand nombre de ses membres architectes, qui sont passés de 88 à 69.

Changement de gouvernement, suppres­sions de postes, départs sans rempla­cements ? La cause de cette baisse est difficile à cerner. Cependant, Line Lamarre et les deux archi­tectes avec qui elle a discuté soutiennent qu’il y a un manque à combler à cet égard dans la fonction publique québécoise.