Prix d'excellence en architecture, catégorie Bâtiments résidentiels de type unifamilial en milieu urbain
Avec son projet La Doyenne, _naturehumaine a illuminé le cœur d’une belle victorienne.
Nicolas Crowley et Bruno Griscelli rêvaient d’une demeure victorienne sur l’avenue Laval, tout près du square Saint-Louis, à Montréal. Dès que l’occasion d’en acquérir une s’est présentée, ils l’ont visitée avec Stéphane Rasselet, cofondateur et architecte principal de _naturehumaine, afin que celui-ci puisse en évaluer le potentiel.
« Nous avons acheté cet ancien bed & breakfast pour le rénover, et nous nous sommes vite rendu compte que ce serait un chantier assez conséquent », souligne Nicolas Crowley. Dans ce bâtiment datant de 1887, il fallait en effet refaire la plomberie et l’électricité, renforcer la structure, remplacer la toiture…
Les nouveaux propriétaires ont habité l’endroit pendant un an tout en réfléchissant à sa métamorphose. Ils ont appris à connaître le bâtiment et son environnement. « La terrasse des voisins était vraiment sous notre nez, et nous n’avions pas d’accès à un jardin. Aussi, la lumière n’entrait pas, ce qui est assez typique de ce type de maison », énumère Bruno Griscelli.
La recherche d’intimité et de luminosité ainsi que l’ajout d’espaces extérieurs ont donc guidé Stéphane Rasselet dans l’ébauche de son plan. « Sa première proposition a déclenché énormément de créativité entre nous trois », se souvient Nicolas Crowley.
Les clients ont alors imaginé une double hauteur côté jardin – inspirée de maisons victoriennes rénovées à Londres. L’architecte a renchéri avec un puits de lumière passant de la mezzanine au salon, afin d’éclairer le centre de la maison. Un espace extérieur a été quant à lui « semi-encastré » dans le sol. Enfin, des fenêtres ont été stratégiquement positionnées dans le but de laisser entrer la lumière naturelle tout en évitant le vis-à-vis avec les voisins. Ces idées ont été intégrées à un second plan, qui a très peu changé par la suite.
« La répartition des espaces est assez inusitée, dit Stéphane Rasselet. Je vois la maison comme un bloc monolithique dans lequel nous sommes venus soustraire des volumes à différents niveaux pour arriver à un concept de boîte évidée dans laquelle des sources de lumière entrent d’un peu partout. » L’architecte ajoute que cette demeure a un petit côté « jeu de serpents et échelles ». L’escalier d’origine en bois mène du salon, situé un demi-niveau au-dessus de la rue, jusqu’à l’étage. Un deuxième escalier donne accès à la cuisine et à la salle à manger en contrebas. Et un troisième, en colimaçon, mène à la terrasse sur le toit. « L’architecte a créé un ruban d’acier d’un vert victorien à travers la maison, c’est très marquant », constate Nicolas Crowley.

Le jour et la nuit
Le projet La Doyenne a présenté plusieurs défis. La démolition d’un ajout à l’arrière, « très mal construit » dans les années 1920-1930, a par exemple nécessité des démarches particulières auprès de l’arrondissement du Plateau-Mont-Royal, ainsi qu’une foule de précautions pour ne pas affecter les propriétés adjacentes.
Les travaux de structure n’ont pas été plus aisés. « Créer une double hauteur de 16 pieds avec une grande fenestration, c’est un défi. Tout comme le fait de devoir conserver au moins 50 % de la structure d’origine côté rue, tel qu’exigé par l’arrondissement », explique Stéphane Rasselet en soulignant que, pour se conformer aux règlements de zonage, il a aussi fallu conserver le studio locatif au rez-de-jardin.
Les nombreux délais dans l’obtention du permis de construire – découlant de modifications demandées par l’arrondis-sement – ont également constitué « une très grande source de stress » pour les clients. « Heureusement, après les blocages du début, ça s’est bien passé, note Bruno Griscelli. L’entrepreneur a bien géré son chantier, et Stéphane est souvent venu suivre l’évolution des travaux. »
Les deux hommes ont réintégré leur maison il y a environ un an. « C’est le jour et la nuit ! assure Nicolas Crowley. Vivre ici est incroyablement agréable. »
Et si la façade n’a pas subi de modifications majeures, le coup d’œil arrière a changé radicalement. « Dans les ruelles, les interventions contemporaines faites sur des bâtiments anciens enrichissent l’expérience des promeneurs et le quotidien des voisins », fait valoir Stéphane Rasselet.

Commentaires du jury
Derrière la façade de cette maison victorienne typique du square Saint-Louis se trouve désormais une résidence où les composantes d’origine, dont le majestueux escalier menant du rez-de-chaussée à l’étage, se conjuguent avec les éléments contemporains dans d’habiles jeux de contrastes. L’exécution remarquable, qui se manifeste par des détails intérieurs soignés, et la relation exceptionnelle que la nouvelle construction à l’arrière entretient avec la ruelle contribuent à l’exemplarité de ce projet. Voilà une rénovation respectueuse, accompagnée d’un agrandissement généreux, dans laquelle chaque élément conserve son autonomie pour former un tout harmonieux.
EMPLACEMENT
Montréal
MAÎTRISE D’OUVRAGE
Nicolas Crowley et Bruno Griscelli
ARCHITECTES
_naturehumaine : Stéphane Rasselet et Pierre-Alexandre Lemieux
ENTREPRENEUR
Jim Farley construction
INGÉNIERIE
Structure : Geniex
Finalistes
deNormanville
Commentaires du jury
Par un geste audacieux, modeste et respectueux du contexte, ce projet répond avec originalité à la question de la préservation des maisons montréalaises de type Shoebox.

Maison Kirsh
Commentaires du jury
À travers un dialogue subtil entre l’existant et le nouveau, la rénovation tout en finesse réinvente et vivifie les espaces de cette résidence moderniste, en plus d’améliorer les liens entre intérieur et extérieur.
