Écoquartier Louvain Est, Montréal,
Fahey et associés
Illustration : Fahey et associés

Les architectes à qui nous avons fait appel sont unanimes : la collaboration avec des partenaires d’autres disciplines favorise la conception de bâtiments et d’aménagements qui répondent mieux aux besoins des gens qui les utilisent.

La Maison du développement durable d’Équiterre reste à ce jour le projet le plus multidisciplinaire auquel a participé l’architecte Anik Shooner, du cabinet MSDL Architectes. Il réunissait des spécialistes en ergonomie, en efficacité énergétique et en gestion immobilière, des chercheurs et chercheuses en aména­gement intérieur, des membres d’Hydro-Québec, etc. 

« L’aventure a démontré que l’approche la plus efficace ne consistait pas à multiplier des solutions hétéroclites, mais plutôt à combiner dès la conception des éléments issus des différentes disciplines, en fonction du climat et du site », explique Anik Shooner. 

L’ouvrage bénéficie de plusieurs inno­vations qui n’auraient pas été conçues en dehors d’une telle collaboration. Le mur végétal du hall, qui agit comme un gigan­tesque biofiltre, en constitue l’exemple le plus specta­culaire. Les systèmes de ventilation dirigent l’air pour qu’il traverse des végétaux disposés verticalement. Il entre donc en contact avec des micro­organismes racinaires, qui le dépolluent en se nourrissant des contaminants aériens. 

Autre choix qui relève de discussions multidisciplinaires : les verres triples pour la fenestration. « Ces innovations augmen­tent le niveau de confort dans l’édifice et contri­buent au sentiment d’appartenir à une commu­nauté res­pectueuse de l’environ­nement », croit Anik Shooner.  

Dépasser la conformité 

« La conception devrait toujours reposer sur la multidisciplinarité, car elle génère plus de valeur pour les gens », affirme Marc-André Maillé, architecte sénior principal et ingénieur de la firme ARTEFAC Architecture.  

Il donne l’exemple des travaux effectués sur les pavillons près du réservoir d’eau potable de Victoriaville. « Nous collaborons avec une spécialiste  
en accessibilité universelle, raconte-t-il. Elle nous pousse à dépasser le simple respect des obligations minimales du Code du bâtiment, pour élaborer  
des espaces plus fonctionnels pour les personnes qui les utilisent. » 

D’autres collaborations procurent des avantages semblables. L’apport d’architectes paysagistes permet par exemple de choisir la meilleure végétation pour retenir l’eau dans des aménagements ou réduire les îlots de chaleur. Des ergo­nomes aident à créer des mobiliers mieux adaptés aux besoins des gens. « La multidisciplinarité décuple les connais­sances que nous pouvons employer pour répondre aux attentes », conclut Marc-André Maillé. 

Chapeau, l’artiste! 

L’agence in situ atelier d’architecture a pour sa part collaboré avec des architectes paysagistes et une agence de commu­nication graphique dans la conception de la structure d’accueil des Jardins de Métis, à Grand-Métis. « La multidisciplinarité ouvre le champ des possibles », résume Stéphane Pratte, architecte principal sénior du cabinet. 

Il mentionne l’écran qui sépare la partie payante de la section non payante des Jardins. « Grâce à cette collaboration, nous en avons fait un objet qui devient tout à la fois une frontière physique, un écran graphique de signalisation et un élément de paysage », explique l’architecte. 

Son bureau a également participé à des installations artistiques, notamment avec Pierre Lapointe, pour le projet Mix off #1, en 2009, au Théâtre d’Aujourd’hui. L’artiste composait des pièces sur un « tenori-on », un instrument de musique électronique japonais. Les sons généraient la cons­truction d’une forme polyédrique tracée avec des fils roses normalement utilisés dans le monde de la maçonnerie. « En collaborant avec des artistes, les architectes peuvent contribuer à créer des événements mémorables pour le public », croit Stéphane Pratte. 

La communauté engagée 

La plupart des projets de la firme d’urbanisme Fahey ont une composante multidisciplinaire. « Nous coordonnons les nombreuses disciplines mises à profit pour répondre aux enjeux des populations », explique l’architecte François Rioux. Selon leur nature, les ouvrages peuvent bénéficier de l’apport de spécialistes du patrimoine, de l’éolien, de la circulation automobile, de l’environnement, de la gestion des déchets ou de l’eau, de l’archéologie, etc. 

La multidisciplinarité peut d’ailleurs s’étendre jusqu’à l’inclusion des futurs résidents et résidentes dans la conception, dans des processus qui vont au-delà des consultations citoyennes. C’est par exemple le cas des écoquartiers, comme celui de Louvain Est à Montréal. Le cabinet Fahey a travaillé à la mise en place du plan directeur de ce projet. « Les gens montraient beaucoup de préoccupations et d’attentes, notamment sur le plan de la gestion de l’eau et de l’agriculture urbaine, raconte François Rioux. La multidisci­plinarité constituait une voie incon­tournable pour y répondre. » 

Au départ, les membres de la communauté se campaient dans une position revendicatrice. « Mais plus on échangeait et plus les rencontres devenaient constructives, rapporte François Rioux. Tout le monde est devenu partie prenante de la réflexion, pour prendre les meilleures décisions en fonction des contraintes et du potentiel du site. » 

Il note que les membres des commu­nautés s’intéressent de plus en plus à leurs milieux de vie. « La communication avec eux et leur intégration dans la conception devient comme une autre discipline,  qui s’ajoute à l’arsenal de la multidis­ciplinarité », souligne-t-il.

La Maison du développement durable, Montréal, MSDL Architectes
Photo : Bernard Fougères