Quand Sylvie Destroismaisons présente une demande de mesures différentes, elle y croit et elle l’obtient. Toujours. Portrait d’une architecte consultante spécialisée en réglementation liée à la sécurité.
Jeune architecte, Sylvie Destroismaisons rêvait de concevoir de grands projets. Le destin l’a menée sur un autre chemin. Aujourd’hui, non seulement a-t-elle une connaissance approfondie des codes et de la réglementation qui touchent à la sécurité du bâtiment, mais elle connaît aussi très bien les intentions qui les sous-tendent et l’éventail des solutions de rechange : une expertise précieuse.
Naissance d’une vocation
Après l’obtention d’un baccalauréat en architecture de l’Université de Montréal, en 1990, Sylvie Destroismaisons fait ses débuts dans des cabinets d’architectes au Nouveau-Brunswick. En 1996, elle devient inspectrice à la Ville de Montréal, puis passe au Groupement technique des assureurs, avant d’aboutir à la Régie du bâtiment du Québec (RBQ), toujours comme inspectrice. Dans le cadre de chaque emploi, elle suit des activités de formation sur la réglementation et acquiert une solide expérience de terrain.
À la RBQ, elle découvre ce qui l’allume : trouver des solutions. « Mon rôle était d’émettre des avis de non-conformité, mais ce que j’aimais, c’était surtout d’expliquer aux propriétaires ce qu’ils pouvaient faire pour corriger la situation. »
En 1999, elle fait donc le saut chez Technorm, une entreprise de consultation en sécurité et conformité du bâtiment. Depuis 2006, elle travaille à son compte, avec comme clientèle des collègues architectes et des propriétaires ou des gestionnaires d’immeubles.

Spécialité : sécurité
Ses clients retiennent ses services pour réviser des plans de nouvelles constructions ou de transformations, pour résoudre des problèmes de conformité ou pour présenter des demandes de mesures différentes aux autorités. L’architecte se spécialise dans les questions de sécurité (incendie, évacuation, chutes) dont traitent les chapitres 3 et 9 du Code du bâtiment.
La firme EVOQ Architecture a eu recours à son expertise pour l’installation d’une voiture de métro à l’intérieur de l’atrium Lorne-M.-Trottier, au troisième étage des pavillons Lassonde de Polytechnique Montréal. Un comité étudiant avait répondu avec succès à un appel de projets de la Société des transports de Montréal (STM), et EVOQ les a épaulés. La voiture MR-63, devenue une aire de repos, a été livrée à l’été 2019.
« Ce projet représentait un sérieux défi réglementaire, relate l’architecte d’EVOQ Éric Moutquin. Sylvie a su démontrer que ce serait sécuritaire, malgré la présence de matériaux combustibles comme les pneus. Elle nous a très bien guidés. »
« Je n’irai jamais présenter une solution si je ne crois pas qu’elle est sécuritaire. »
– Sylvie Destroismaisons
Dans un édifice patrimonial comme une église, un problème d’issues de secours peut être résolu en imposant une limite au nombre de personnes admises à l’intérieur. Dans un immeuble à logements comprenant des corridors en impasse, Sylvie Destroismaisons a réalisé une analyse complète qui a permis d’éviter l’élimination d’une douzaine de logements pour aménager des cages d’escaliers. Les planchers étaient en béton et les logements, séparés par des murs de maçonnerie. La compartimentation dépassait largement les normes actuelles, de sorte que pour contenir la fumée et les flammes et permettre l’évacuation, il suffisait d’ajouter des ferme-porte !
« Je n’irai jamais présenter une solution si je ne crois pas qu’elle est sécuritaire », insiste Sylvie Destroismaisons en parlant des demandes de mesures différentes qu’elle présente à la RBQ. Telle une avocate qui plaide devant la cour, elle prépare des dossiers étoffés qui répondent à toutes les interrogations possibles. « Je mets tout : les extraits du Code, les intentions du Code et des comparatifs [avec les codes d’autres régions d’Amérique du Nord]. Je déblaie le terrain pour aider [les membres du personnel de la RBQ et des villes] et les rassurer afin qu’ils puissent mieux analyser le projet. » Son taux de succès : 100 %.

Image : Studio MMA
Des intentions à l’application
L’architecte est en effet bien placée pour connaître les intentions qui sous-tendent les articles des codes. De 2008 à 2015, elle a été membre du comité consultatif formé par la RBQ pour proposer et commenter les révisions au Code de construction du Québec. Depuis 2015, elle siège au comité permanent sur l’usage et les moyens d’évacuation des bâtiments à la Commission canadienne des codes du bâtiment et de prévention des incendies.
« Elle comprend parfaitement le pourquoi derrière chaque exigence du Code et elle sait nous l’expliquer, confie l’architecte Vouli Mamfredis, du Studio MMA Architecture + Design. Le seul problème maintenant, c’est que trop d’architectes ont découvert son talent ! »