Pour désigner ses Prix d’excellence en architecture cette année, l’OAQ s’est appuyé sur les 11 principes directeurs de la qualité architecturale énoncés dans la nouvelle Politique nationale de l’architecture et de l’aménagement du territoire. Coût du cycle de vie, patrimoine culturel, pérennité du bâti, expérience, confort...
Ces principes, les architectes les connaissent déjà, mais il est enthousiasmant de voir nos institutions en faire des attentes explicites depuis un an. En effet, le gouvernement du Québec les diffuse et les intègre au plan de mise en œuvre de sa Politique. Le ministère de la Culture et des Communications les explique dans son Aide-mémoire sur la qualité architecturale. C’est dire que les donneurs d’ouvrage publics en entendront parler et que les villes devront en tenir compte dans leur réglementation.
Bref, le Québec s’est doté d’un langage commun pour discuter de la qualité de son architecture.
Bien sûr, les mots doivent se traduire en résultats construits. Le plan de mise en œuvre de la Politique, paru en juin dernier, est doté d’une enveloppe de 360 M$ sur 6 ans. Il donne un aperçu de ce qui s’en vient, et il y a du bon.
La qualité à l’ordre du jour
Parmi les mesures, qui ratissent tout le spectre de l’aménagement, Québec entend moderniser le cadre d’intervention en architecture. Il est entre autres question d’ajuster les modes d’attribution de la commande publique, d’ici 2024, pour favoriser la créativité, l’innovation et la qualité architecturale. Enfin !
D’importants efforts de sensibilisation devront être déployés pour convaincre la société québécoise que la qualité architecturale est un investissement à long terme, au service du bien commun.
Notons également l’intention de réaliser un inventaire et une caractérisation des bâtiments patrimoniaux de l’État, ce qui devrait améliorer la préservation et la mise en valeur de ces richesses collectives. On prévoit de plus la production d’une cartographie pour aider à la prise de décision en matière d’aménagement du territoire, de paysages et d’architecture. Ce travail sera colossal, on s’en doute, mais il constituera un legs important pour les générations futures. Améliorer l’accessibilité universelle dans les petits bâtiments, chaînon manquant de la mobilité pour plusieurs, fait aussi partie du plan.
Il faut par ailleurs saluer la création du Bureau de la valorisation de l’architecture, qui aura notamment pour mandat d’encourager la recherche, l’innovation et le transfert de connaissances. C’est un excellent début ! Espérons qu’à terme, ce Bureau saura se positionner comme un champion de la qualité architecturale au sein de l’appareil d’État et au-delà. Il le faudra, car d’importants efforts de sensibilisation devront être déployés pour convaincre la société québécoise que la qualité architecturale est un investissement à long terme, au service du bien commun.
Des mises en garde
Québec a soumis à la consultation ses nouvelles orientations gouvernementales en aménagement du territoire, les OGAT. Certaines portent sur la qualité architecturale, ce qui est une excellente chose, bien qu’elles puissent être améliorées.
Dans un mémoire publié à la fin de l’été, l’Ordre met le gouvernement en garde contre la tentation d’utiliser les 11 principes de la qualité comme une liste procédurière de vérification point par point, qui ne tiendrait pas compte de l’intelligence globale des projets, de l’équilibrage à faire pour assurer la pertinence des interventions. En cette matière, les architectes sont des équilibristes convaincants !
De plus, la qualité d’un projet dépend de certaines conditions de réalisation (budget et délais réalistes, entre autres). Or, quoique l’aide-mémoire cité plus haut les définisse de manière éloquente, les OGAT les oublient. C’est dommage.
Enfin, l’Ordre estime que le gouvernement manque d’ambition quand il demande que la recherche de qualité touche « minimalement » les composantes d’intérêt historique, culturel ou esthétique. Tout ce que nous construisons devrait viser la qualité et l’intérêt pour les générations futures. Sinon, nous gaspillons. Le patrimoine de demain se bâtit aujourd’hui.
À nous de jouer
Dans ce contexte, nous, architectes, avons tout intérêt à renforcer le message. L’Aide-mémoire sur la qualité architecturale est un formidable outil pédagogique. Je nous invite donc à le faire connaître à nos partenaires et clients et clientes, qu’ils et elles soient du secteur public ou privé. Je nous invite aussi à y apporter les nuances et les compléments nécessaires, au fil des dialogues qui ponctuent nos mandats.
La nouvelle Politique multipliera les occasions de parler d’architecture au Québec, et il faut s’en réjouir. Il faut surtout en profiter pour relever nos ambitions, comme architectes et comme société. Parce que toute la population a droit à une architecture de qualité.