Université de l'Est Anglia
Enterprise Centre at University of East Anglia, Norwich (Royaume-Uni), Architype
Photo : Architype

Le Design Quality Indicator (DQI) est un des outils pouvant être utilisés pour réaliser une évaluation post-occupation. Sa portée est cependant beaucoup plus large, car il englobe toutes les étapes d’un projet.

Au tournant des années 2000, le Construction Industry Council (CIC) souhaitait améliorer la qualité de la conception des bâtiments au Royaume-Uni. Après quatre ans de réflexion axée sur les trois principes de Vitruve (durabilité, utilité, beauté) et leurs déclinaisons modernes (fonctionnalité, qualité de construction, impact), le CIC et ses nombreux partenaires publics ont lancé en 2003 un tout nouvel outil baptisé Design Quality Indicator (Indicateur de la qualité de la conception), ou DQI.

L’idée de base est de stimuler la discussion entre les différents acteurs liés au projet – client, usagers, gestionnaire d’immeuble, architectes, ingénieurs, etc. – tout au long de celui-ci, afin qu’ils en arrivent à une compréhension commune des objectifs se rattachant à la qualité de conception. « Nous réunissons le plus grand nombre de parties prenantes à cinq occasions : au début du projet, deux fois pendant l’étape de conception, au moment de la mise en service du bâtiment et, finalement, après 6 à 12 mois d’occupation, détaille Paul Mercer, directeur chez Tangram Architects à Londres et facilitateur DQI de longue date. Les ateliers de discussion les plus importants sont le premier et le dernier, car poser les mêmes questions permet de réaliser une boucle de rétroaction quant à la satisfaction des usagers. »

Ces échanges sont basés sur un question­naire, qui est « très générique et peut être utilisé pour tout type de bâtiment », note Paul Mercer. Or, il en existe en Grande-Bretagne des variantes spécialisées, l’une s’appliquant aux écoles et l’autre aux infrastructures de santé. Cette dernière, en plus d’inclure le contrôle des infections, accorde plus d’importance à la ventilation et la lumière naturelle, par exemple. Paul Mercer et son collègue facilitateur James Chapman – tous deux fellows de l’Institute of Healthcare Engineering and Estate Management – ont accompagné des dizaines d’établissements du domaine de la santé dans leurs démarches DQI. Aucune ÉPO n’a été effectuée, cependant. « Les clients sont très peu disposés à réaliser cette dernière étape », se désole Paul Mercer. 

Aux États-Unis

Au début des années 2000, l’Américain Marc Sallette étudiait à la London School of Economics et cherchait une manière d’utiliser l’architecture et le design pour augmenter la valeur des biens immobiliers. C’est ainsi qu’il a découvert le DQI. « Le génie de cet outil, c’est que son questionnaire est incroyablement efficace et permet de savoir exactement où investir au moment d’une rénovation ou d’une construction, explique-t-il. Car si l’argent est alloué aux mauvais éléments, les utilisateurs du bâtiment seront insatisfaits, et le rendement de l’investissement sera négatif. »

Marc Sallette a tellement aimé le produit qu’il a cofondé en 2006 DQI USA, entreprise qui commercialise la version américaine du DQI. La licence de propriété intellectuelle inclut le Canada, bien que l’outil n’y ait pas été utilisé à ce jour. Un de ses premiers clients a été la chaîne hôtelière Hyatt, qui voulait réaliser des rénovations ciblées afin d’augmenter ses revenus, sa pénétration du marché et la satisfaction de ses employés et clients tout en diminuant ses dépenses en capital.

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Dans le secteur public, le premier client d’envergure de DQI USA a été la Ville de New York. « L’administration [de Michael] Bloomberg souhaitait faire preuve de transparence quant à la façon dont les budgets de la Ville étaient dépensés, alors qu’un grand nombre d’édifices publics devaient être rénovés ou construits. L’objectif était de s’assurer que ce soit fait en respectant une certaine norme de qualité qui corres­pondait aux besoins des utilisateurs », se souvient Marc Sallette. Durant trois ans, la méthodologie DQI a ainsi été appliquée à plus de 70 projets de bibliothèques, de postes de police, de musées et autres casernes de pompiers d’une valeur totale de plus de 320 M$ US. « En 2010, l’économie s’est effondrée, et ils ont cessé de l’appliquer », note-t-il à regret. À son avis, c’est justement quand les finances sont serrées que l’outil acquiert toute sa pertinence. Il donne l’exemple d’une université de l’Illinois qui a fait appel au DQI afin de déterminer le meilleur phasage de ses rénovations sur plusieurs années.

À présent, bien que les États-Unis comptent une centaine de facilitateurs DQI qualifiés et que l’outil fasse partie des directives du National Institute of Building Sciences pour les bâtiments fédéraux, on n’y a que peu recours pour les projets du secteur public. Au point où DQI USA a fermé ses bureaux à Chicago et que son cofondateur se consacre maintenant en parallèle à son poste de premier vice-président au financement par emprunts et par actions chez CBRE Hotels Capital Market.

Ce n’est donc pas une coïncidence si ce sont principalement les grandes chaînes hôtelières qui ont aujourd’hui recours à l’outil DQI en ligne, dont une variante a été mise au point spécialement pour leurs besoins. À l’heure actuelle, le plus grand utilisateur est Hilton Worldwide, qui l’a employé dans environ 450  de ses établissements. « Avec toutes les formidables données que nous avons récoltées et qui prouvent à quel point le DQI améliore la performance des hôtels, nous espérons en faire une norme d’évaluation dans cette industrie », conclut Marc Sallette.