Contrôle qualité
Photo : John Schnobrich, Unsplash

Les creux d’activité comme celui qu’a occasionné la pandémie de Covid-19 constituent un bon moment pour réviser les processus de votre entreprise. Instaurer, par exemple, un système de contrôle qualité vous fera gagner du temps quand l’activité reprendra.

Cartouches incomplets, contradictions entre le devis et les plans, calques numériques qui disparaissent dans la version imprimée des plans : rien de plus gênant que de se voir souligner de telles bourdes par le client ou l’entrepreneur. Il est pourtant possible de réduire au minimum ces erreurs embarrassantes en se dotant d’un système de contrôle qualité. Voici quelques repères.

Le système contrôle qualité, c’est quoi ?

Le système de contrôle qualité, c’est l’ensemble des moyens mis en œuvre pour atteindre les normes de qualité qui ont été préalablement définies dans un plan de gestion de la qualité, la feuille de route d’un bureau pour tout ce qui concerne ses exigences en matière de qualité des services. Il permet notamment de prévenir des erreurs et, donc, de diminuer les coûts découlant de leur correction, de réduire les délais et d’augmenter la productivité. Ce faisant, il contribue à la réalisation des objectifs d’affaires de la firme, à la satisfaction de la clientèle et à celle du personnel. Il facilite même la formation des nouveaux employés.

Est-ce vraiment nécessaire ?

D’après William T. Nigro, auteur de la méthode de révision de documents de construction RediCheck, on trouve en moyenne cinq erreurs par feuille de dessin émise en architecture. Toujours selon cet auteur, près de 50 % des demandes de changement au chantier proviennent d’erreurs de coordination dans les plans et devis. Voilà qui est plutôt inquiétant !

Dans son guide Lancer sa firme d’architecture : l’essentiel, le Fonds des architectes souligne pour sa part que plusieurs réclamations auraient pu être évitées si les firmes en cause avaient mis en place un système de contrôle de la qualité et l’avaient appliqué rigoureusement avant d’émettre des plans. Il y a donc place à l’amélioration.

Des yeux tout le tour de la tête

Concrètement, comment mettre en place un tel système ? D’abord, il faut cartographier chaque tâche effectuée par votre bureau. Un patron peut s’en charger, mais il est préférable d’inclure les employés dans le processus afin d’avoir une vision d’ensemble claire. Rocio H. Venegas, architecte et associée chez rocioarchitecture, a fait appel à un consultant pour l’aider à instaurer un système de contrôle qualité : « Il a proposé de commencer en décortiquant les étapes d’un projet type, de l’appel du client potentiel, jusqu’à la fermeture du dossier. »

La revue par des pairs peut être envisagée dans le flux du travail, puisqu’un regard extérieur permet souvent de repérer les éléments à ajuster.

Une fois cette analyse terminée, il faut ensuite associer un système adapté à chaque étape. Par exemple, en conception, on peut établir une fiche de contrôle de projet pour s’assurer de l’arrimage avec les besoins du client et les contraintes réglementaires. À l’étape de la production, on peut recourir à des listes de contrôle ou à des aide-mémoire pour s’assurer que les dessins sont complets et conformes aux diverses normes. L’usage de documents types aux différents stades du projet peut éviter l’omission de détails importants. La revue par des pairs peut également être envisagée dans le flux du travail, puisqu’un regard extérieur permet souvent de repérer les éléments à ajuster.

Le contrôle qualité peut aussi s’appliquer de façon plus large, notamment en ce qui a trait aux méthodes de travail et aux processus, voire à la gestion des ressources humaines : formation des employés, recrutement et gestion du personnel au quotidien. Enfin, tout bon système de contrôle qualité doit comporter des activités de veille concernant les nouvelles lois, procédures, ressources et méthodes de travail propres à la profession.

Motiver les troupes

Lorsqu’on modifie ainsi les processus d’une firme, l’engagement des employés est la clé du succès. Rocio H. Venegas mentionne qu’au début, l’utilisation des nouveaux outils représentait un effort supplémentaire pour son équipe. Plusieurs rappels ont dû être effectués en cours de route, mais une fois la réticence passée, la patronne a constaté non seulement une amélioration de la qualité des documents, mais aussi une consolidation de la culture d’entreprise.

Même si vous nommez une personne responsable du plan de gestion de la qualité et du système de contrôle qualité, assurez-vous que tous se sentent concernés. Après tout, il en va de la compétence et de la réputation de l’ensemble de la firme. Assurez-vous également de maintenir le système et ses outils à jour, en prévoyant entre autres des révisions ponctuelles et une façon de recueillir les suggestions des utilisateurs.

Vous travaillez seul ? 

Le contrôle de la qualité est particulièrement important si vous exploitez une entreprise individuelle. En effet, il est difficile de prendre du recul par rapport aux documents que l’on a soi-même conçus. L’utilisation d’aide-mémoire adaptés aux différentes étapes de travail est bien sûr une bonne façon d’éviter les oublis. Vous pouvez en outre coupler ces outils avec des logiciels qui permettent d’effectuer un contrôle visuel. Ainsi, il est possible de superposer les plans de plusieurs intervenants, ou d’utiliser une fonction comme « comparer les fichiers » d’Acrobat Pro ou de Draftable.

Pour vous tenir à jour quant aux divers aspects du contrôle qualité – et pour briser l’isolement –, pourquoi ne pas inclure à votre planification annuelle des rencontres régulières avec des collègues architectes ? Cela doit bien sûr se faire à distance en cette période de pandémie. Vous pouvez en profiter pour vous entraider sur d’autres facettes de la pratique, par exemple en échangeant des jeux de plans ou en commentant vos travaux respectifs.

Le contrôle de la qualité peut s’effectuer de mille et une façons. L’important est de vous doter d’un système adapté à votre bureau et à votre pratique. Plus votre système sera personnalisé, flexible et vivant, plus il contribuera à la qualité de votre travail. Certes, l’implantation d’un tel système demande un investissement en temps et en main-d’œuvre. Mais, au final, vous éviterez bien des erreurs et votre réputation en bénéficiera. Pourquoi donc s’en passer ?

En savoir plus

Manuel canadien de pratique de l’architecture, section 2.1.8 (téléchargeable via l’espace membre de l’OAQ).

Project Management Institute, A Guide to the Project Management Body of Knowledge, 6e édition, Newtown Square, 2017.

RIBA, RIBA Plan of Work, RIBA, 2020. 

Fonds des architectes, Lancer sa firme d’architecture : l’essentiel, Fonds des architectes, 2019 (téléchargeable via l’espace membre de l’OAQ).

William T. Nigro, RediCheck Interdisciplinary Coordination (RediCheck Book), 6e édition, RediCheck, 2015.

  • Maude Hallé Saint-Cyr est inspectrice à l’OAQ et Karène Laprise est coordonnatrice de la pratique professionnelle