Depuis une dizaine d’années, Érick Rivard, lauréat du prix Engagement social de l’OAQ, multiplie les interventions aux quatre coins de Limoilou pour créer des lieux de rencontre, occuper l’espace public et mettre en valeur les paysages du quotidien.
« Tout le monde à Limoilou connaît Érick Rivard pour ses actions. Toutes ses initiatives ont été couronnées de succès », lance d’emblée Suzanne Verreault, conseillère municipale de ce district depuis 2009. Au cours des dix dernières années, l’architecte associé et designer urbain chez Groupe A/Annexe U a mené une foule d’actions bénévoles dans ce secteur de Québec, où il a notamment été président du conseil de quartier.
Le regard de l’architecte est rafraîchissant, estime l’élue. « Je lui demande souvent conseil sur les questions d’urbanisme ou d’aménagement. Il est très au courant des nouveautés ailleurs dans le monde et apporte de nombreuses solutions. Érick a laissé sa marque avec des projets qui stimulent le sentiment d’appartenance, la vitalité du quartier. Et en plus d’avoir des idées intéressantes, il est capable de les porter avec la communauté. »
Suzanne Verreault cite en exemple le Grand Bazar des ruelles, une vente-débarras qu’il a lancée à l’échelle du quartier en 2008. « Ça a commencé tout petit, et lors des dernières éditions, l’évènement a attiré plus de 10 000 personnes », affirme la conseillère. En plus de mettre en valeur la centaine de ruelles de Limoilou, l’activité favorise le bon voisinage.
Adepte d’urbanisme tactique, l’architecte mise sur des interventions simples, mais à grande portée. « Je m’intéresse aux paysages du quotidien qui peuvent sembler banals, mais qui, avec une simple intervention, peuvent révéler une richesse insoupçonnée. »

Limoilou : terreau fertile pour l’innovation
Le quartier Limoilou, qu’il habite depuis 2008, est devenu un terreau fertile pour mettre en pratique ses idées. Érick Rivard a ainsi été l’un des précurseurs du mouvement des places publiques éphémères, qu’il découvre lors d’un voyage à San Francisco qu’il organise en 2013 en tant que chargé de cours à l’École d’architecture de l’Université Laval. Il repère alors des parklets, ces placettes installées le long des trottoirs.
Il s’en inspire pour créer « Limoilou dans la rue », un placottoir implanté en 2014 sur des cases de stationnement de la 3e Avenue. Avec ses bancs et son piano public jaune vif, la placette a selon lui permis d’habiter différemment cette portion de l’artère commerciale. « Au début, l’idée a suscité un débat sur l’utilisation de l’espace public », explique-t-il. Mais l’installation a vite été adoptée par la communauté. Cette réalisation a d’ailleurs remporté le certificat de mérite des Prix nationaux du design urbain de l’Institut royal d’architecture du Canada en 2016.
L’architecte a travaillé de concert avec son milieu pour entreprendre d’autres actions du genre, comme l’Espace parvis, qui met en valeur l’église Saint-Charles. « Ensuite, ça s’est répandu dans Québec. Je pense que l’an dernier, il y avait une trentaine de places éphémères à travers la ville. »
Érick Rivard a aussi participé à différents comités consultatifs à la Ville de Québec, sur l’habitation ou le transport en commun. Il a aussi été membre de la Commission de conservation et d’urbanisme de la municipalité de 2011 à 2020. « C’est vraiment intéressant d’ajouter sa couleur en tant qu’architecte à ces débats et de savoir que certaines actions, comme l’implantation d’un tramway, seront toujours en place dans 50 ans. »

Des concepts qui prennent vie
Pour Jacques White, directeur de l’École d’architecture de l’Université Laval, Érick Rivard se distingue par son humanisme et sa capacité à concrétiser ses idées. « En architecture, il ne s’agit pas simplement de construire des bâtiments les uns à côté des autres, mais de créer des milieux de vie. Et surtout, au-delà de la forme et de la conception d’un espace public, il y a la manière de le faire vivre. C’est l’une des forces d’Érick : la capacité de poser les gestes qui auront un maximum d’effet. »
C’est aussi l’approche qu’il transmet à ses étudiantes et étudiants en tant que chargé de cours. « Érick Rivard est capable de faire le lien entre de grandes idées, des concepts plus théoriques et de petites actions qui permettront de les mettre en pratique, observe le directeur. Cette approche est très appréciée. » Sa volonté de communiquer se répercute également dans ses nombreuses interventions médiatiques à l’échelle locale ou nationale.
Mais par-dessus tout, Érick Rivard estime que les architectes possèdent les outils qu’il faut pour devenir des acteurs influents dans leur milieu. « Nous avons la chance de pouvoir passer des idées, qui sont des abstractions, à des projets concrets. Notre force, c’est de prendre un papier et un crayon et de dessiner nos idées. » Une aptitude qu’il entend bien continuer de mettre à profit pour laisser sa trace dans son milieu, dans son quartier, dans sa ville…