Refuge à Saint-Calixte
Refuge à Saint-Calixte, Laroche Architecte
Photo : Dominique Laroche

En 2017, le Refuge à Saint-Calixte, conçu par Laroche Architecte, recevait la mention Bâtiment écologique des Prix d’excellence de l’OAQ. La maison allie matériaux écologiques et approche bioclimatique. En plus, grâce à ses murs en bois lamellé-croisé sans pare-vapeur, elle respire !

Si Dominique Laroche a choisi le bois lamellé-croisé (CLT, pour cross-laminated timber) au lieu de la traditionnelle ossature légère en « 2 x 4 »pour construire sa demeure, c’était pour se familiariser avec ce matériau avant de l’intégrer à des projets pour ses clients. Ce faisant, il a découvert qu’il pouvait se passer de pare-vapeur et, ainsi, allonger la durée de vie de la charpente.

Le pare-vapeur empêche la vapeur d’eau contenue dans l’air intérieur de la maison de pénétrer dans le mur, mais une erreur dans la composition de celui-ci peut piéger l’eau à l’intérieur, où elle risque de se condenser et d’altérer les matériaux. « On s’expose à de la pourriture à long terme », explique l’architecte. En outre, il fait remarquer que, dans les murs des anciens bâtiments, l’absence de pare-vapeur permet les échanges d’humidité, ce qui contribue à prévenir ce genre de problèmes. « Je fais de la rénovation sur une maison de plus de 100 ans et la charpente en bois est comme neuve », témoigne-t-il.

C’est le même principe qu’il a mis à profit, en 2012, en concevant sa maison en lamellé-croisé. « En raison de son épaisseur, le CLT agit comme une éponge qui absorbe et relâche l’humidité d’une saison à l’autre », compare Dominique Laroche. Il s’est tourné vers le fournisseur autrichien KLH, qui disposait de données sur la perméance de ses produits (contrairement au québécois Nordic Structures).

Le CLT sous la loupe

Parallèlement, dans une étude publiée en 2013 dans la revue Advances in Civil Engineering Materials, le centre de recherche FPInnovations avait soumis des échantillons de CLT à une batterie de tests pour mesurer notamment sa perméance à la vapeur d’eau. Chercheuse principale chez FPInnovations et coauteure de l’étude, Jieying Wang précise par courriel que les perméances mesurées vont de 3,4 à 30 ng/Pa.s.m2 selon l’épaisseur des panneaux et l’humidité relative. Or, selon le Code national du bâtiment, un matériau dont la perméance est inférieure à 60 ng/Pa.s.m2 se qualifie comme pare-vapeur. L’étude concluait donc qu’il ne devrait pas être nécessaire d’ajouter de pare-vapeur dans des assemblages de murs composés de panneaux de lamellé-croisé.

FPInnovations s’est ensuite associée au projet de Dominique Laroche pour observer in situ le comportement réel des murs. De mars 2014 à janvier 2016, huit sondes ont mesuré l’humidité relative de part et d’autre des panneaux de CLT. Les résultats montrent qu’en hiver l’humidité est plus forte sur la face intérieure du mur que sur la face extérieure. La vapeur d’eau produite par le chauffage et les occupants reste donc localisée à l’intérieur et ne traverse pas le mur. Inversement, en été, l’humidité est plus élevée du côté extérieur du CLT. Comme l’explique Jieying Wang : « Il y a une forte différence de pression de vapeur entre l’intérieur et l’extérieur, et cette différence varie généralement avec les saisons. Cela indique que les panneaux de CLT ont une forte résistance à la pression de vapeur d’eau entre l’intérieur et l’extérieur. Cela concorde avec nos expériences de laboratoire. »

Des murs performants

Pour l’isolant, Dominique Laroche a opté pour la cellulose. « Elle a aussi une grande capacité d’absorption de l’humidité. C’est donc un choix logique dans l’idée d’un mur qui respire », justifie-t-il. De l’intérieur vers l’extérieur, le mur comprend : un panneau de CLT, un premier pare-air, une cage en madriers contenant 7 po de cellulose, un deuxième pare-air, les fourrures et une finition extérieure de cèdre rouge.

Les murs du Refuge affichent une résistance thermique allant de 30,5 à 31,9 R selon l’épaisseur des panneaux de CLT. En combinaison avec l’approche bioclimatique, qui optimise les gains solaires et la masse thermique des planchers de béton, ils contribuent à l’excellente performance énergétique de la résidence. « Il y a trois ans, pendant les fêtes, il a fait -30 °C durant sept jours, mais il faisait soleil. Quand le soleil entrait dans la maison, le chauffage s’arrêtait et il repartait seulement dans la nuit pour quelques heures », commente Dominique Laroche. En été, la canopée ombrage la maison, faisant office de climatisation.

Correctif

Une ancienne version de cet article suggérait qu’il fallait faire une demande de mesures équivalentes ou différentes auprès de la Régie du bâtiment du Québec (RBQ) afin d’employer du bois lamellé-croisé en guise de pare-vapeur. Or, la RBQ nous confirme le contraire : « Le dépôt d’une demande de mesures équivalentes ou différentes à la RBQ n’est pas nécessaire si la perméance du produit utilisé pour jouer le rôle de pare-vapeur correspond aux exigences réglementaires. En considérant que les résultats des tests effectués par le Centre de recherche FPInnovations sont conformes aux exigences de la norme ASTM E 96/E 96M – Water Vapor Transmission of Materials, le CLT pourrait être considéré comme pare-vapeur. »