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Le conseiller aux politiques Nicolas Fontaine (ministère des Affaires municipales et de l’Habitation) a pris la parole aux côtés de l’architecte Marie-Claude Le Sauteur (Ville de Laval), de l’urbaniste Samir Admo (Ædifica) et de l’architecte et designer urbain Érick Rivard (Annexe U).
Photo : Jimmy Hamelin

Architectes, urbanistes et promoteurs : tous s’accordent sur la nécessité de densifier nos milieux urbains. Mais comment concilier qualité, rentabilité et intérêt public dans la mise en œuvre ?

C’est sur cette question que se sont penchés, le 5 novembre dernier, les panellistes invités au Forum sur la densité urbaine, organisé par l’OAQ en collaboration avec l’Ordre des urbanistes du Québec. Voici quelques interventions qui ont marqué les échanges.

Pour l’architecte Maxime-Alexis Frappier, nous sommes à un moment clé pour promouvoir la densification urbaine : « La densification est une réponse aux enjeux climatiques de notre époque et un moyen d’améliorer la qualité de vie. Il faut profiter de la tendance actuelle au partage des ressources pour faire la promotion de ce vivre-ensemble avant que le développement de l’automobile électrique ne dédouane le recours à ce moyen de transport. »

Un point de vue qui ralliait les différents intervenants du forum, mais que ne partagent pas toujours les citoyens qui voient des projets de densification urbaine s’élever près de chez eux…

La discussion, clé de l’acceptabilité

Pour Catherine Boisclair, urbaniste et coordonnatrice du projet « Oui dans ma cour ! » à l’organisme Vivre en Ville, intégrer les citoyens dans le processus est la clé de son acceptabilité. « Il faut outiller les citoyens, les former à l’urbanisme pour qu’ils prennent part à la discussion, et le plus en amont possible des projets. »

Gil Hardy, architecte et cofondatrice de NÓS Architectes, abonde dans le même sens : « Comme architectes, nous devons être moins souvent devant notre ordinateur et plus souvent sur les sites à écouter les usagers, qui connaissent les quartiers. Ainsi, on amène nos clients à réaliser de meilleurs projets, liés aux problématiques locales. »

Quant à Érick Rivard, architecte et designer urbain chez Annexe U, il croit que la promotion et l’acceptabilité de la densification dans les banlieues passent par « des investissements massifs en transport collectif, pour inverser le modèle de transport avant même de penser à un nouveau projet [de densification du bâti]. C’est la recette du succès ». Il donne l’exemple de Vancouver, où des stations du SkyTrain ont été implantées à même des stationnements de centres commerciaux.

Vision forte et critères souples

Les participants au forum ont du reste été nombreux à dire souhaiter des visions gouvernementales et municipales claires et mieux harmonisées en faveur de la densification du bâti, ainsi que des réglementations et des investissements conséquents. « Les autorités publiques ont la responsabilité de “vendre” les projets de densité auprès de la population, pour créer une demande », dit Patrick Marmen, consultant en design urbain et président du Comité Jacques-Viger à la Ville de Montréal.

La faiblesse des investissements gouvernementaux en faveur de la densification a d’ailleurs été qualifiée d’« éléphant dans la pièce » par l’ancien maire de l’arrondissement de Rosemont–La Petite-Patrie, André Lavallée, qui a pointé du doigt les carences en transport et en établissements de santé dans l’est de Montréal. Catherine Boisclair a pris la balle au bond : « Clairement, les gouvernements ont énormément de pouvoir sur l’aménagement du territoire. Les quartiers denses méritent des investissements à la hauteur des populations qui les habitent. »

Plusieurs intervenants ont également réclamé un assouplissement du cadre réglementaire. Christian Yaccarini, président et chef de la direction de la Société de développement Angus, a par exemple dénoncé la part d’arbitraire et le manque de cohérence en la matière : « Au Technopôle Angus, la limite de hauteur est fixée aux 20 mètres du Locoshop [un ancien atelier de réparation de locomotives converti en bâtiment commercial]. Ce n’est basé sur rien de logique, déplore-t-il. On vient d’adopter le programme 20-20-20 [soit l’exigence pour les projets de comporter 20 % de logements sociaux, 20 % de logements abordables et 20 % de logements familiaux] au nom de l’acceptabilité sociale. Mais toujours au nom de l’acceptabilité sociale, on a retiré deux étages à Angus, avec pour résultat moins de logements abordables… C’est incohérent. » 

« Si la réglementation est un frein à la densification, alors il y a un problème de vision et de planification, a reconnu Nicolas Fontaine, conseiller aux politiques au ministère des Affaires municipales et de l’Habitation. C’est signe que les professionnels de l’aménagement doivent réfléchir plus en détail au territoire souhaité, pour ensuite modifier la réglementation. »

« Ce que nous construisons maintenant va probablement être en place pendant 100 ans, a rappelé Laurence Vincent, coprésidente du Groupe Prével. Il faut faire aujourd’hui des choix qui répondront aussi aux besoins de demain. » 

Les vidéos des panels peuvent être consultées en ligne. Membres de l’OAQ : à partir de l’Espace membre (70 $ par vidéo). Stagiaires en architecture : à partir de l’Espace stagiaire (35 $ par vidéo). Non-membres : à partir du catalogue de formations en ligne de l’OAQ (85 $ par vidéo).