Prix d'excellence en architecture, catégorie Bâtiments résidentiels de type unifamilial en milieu naturel
Concevoir une maison contemporaine sur le territoire chargé d’histoire de l’île d’Orléans : voilà le mandat que France Rodrigue et Hugo Drouin ont confié à Blouin Orzes architectes. La Maison de l’Île s’élève aujourd’hui face au fleuve, bien ancrée dans son lieu d’adoption.
« Les clients voulaient faire construire une résidence secondaire. C’est un projet qu’ils nourrissaient de longue date, alors les attentes étaient élevées, explique Marc Blouin. Ils étaient par ailleurs conscients de l’endroit où ils mettaient les pieds. Il fallait que le projet s’intègre harmonieusement au cadre bâti à caractère patrimonial de l’île. »
Ils ont eu le flair de choisir un architecte qui connaît bien ce contexte unique et le cadre réglementaire à respecter. « Mes racines sont à l’île d’Orléans, dit Marc Blouin. J’y ai aussi réalisé quelques projets, toujours avec une approche contemporaine de l’architecture. »
Une articulation soignée
Même si elle s’inspire des premières maisons construites sur ce lieu fondateur de l’Amérique française, la nouvelle demeure est bien de son temps. « La forme est épurée, avec une toiture à forte pente, commente l’architecte. Pour la volumétrie, on s’est inspirés de la maison Félix-Goulet, située à Saint-Pierre-de-l’île-d’Orléans, dont la construction remonte à 1720. Elle est emblématique de l’architecture traditionnelle de l’île. »
L’architecte s’est toutefois autorisé un jeu de volumes. D’un côté, un bloc qui accueille les espaces de vie; de l’autre, une dépendance – caractéristique des habitations du 18e siècle – qui abrite un garage et un atelier. L’intérieur comporte une vaste aire ouverte qui profite en plus de la double hauteur créée par la pente du toit, à la demande expresse des clients. La structure est apparente, marquée par des poutres d’acier qui semblent flotter au-dessus de la pièce centrale. Un escalier, en partie caché par la cloison du foyer, donne accès à l’étage, où sont situées les chambres.
L’agencement de deux volumes a aussi permis à l’architecte d’aménager des espaces extérieurs couverts, notamment un passage qui relie l’avant et l’arrière de la maison et crée une fenêtre sur le fleuve ainsi qu’une longue galerie, nichée sous un porte-à-faux de trois mètres.
Certains choix de conception n’ont pas été simples à faire autoriser sur ce territoire où les nouvelles constructions sont encadrées par le plan de conservation du site patrimonial de l’Île-d’Orléans, adopté par le ministère de la Culture et des Communications du Québec en 2018. « Il s’agit d’un guide de conception dont l’application peut laisser place à l’interprétation, explique Marc Blouin. On a parfois dû défendre nos concepts architecturaux, par exemple celui de disposer l’entrée sur un côté de la maison. Selon le Plan de conservation, l’accès principal doit faire face au chemin Royal qui ceinture l’île. Or, la maison se situe au bout d’un chemin de ferme, en contrebas, en bordure du fleuve. Somme toute, ces échanges ont permis un dialogue constructif sur l’architecture contemporaine en milieu patrimonial avec les gens du ministère. »
L’achat local
D’autres décisions allaient toutefois de soi, comme le choix des matériaux. « Le bois est très présent dans la Maison de l’Île, autant à l’intérieur qu’à l’extérieur, souligne l’architecte. Pour le revêtement extérieur, on a opté pour des planches posées à la verticale qui ont été traitées de façon à leur procurer une belle texture brute. » Ce travail a été exécuté par la Scierie Blouin, une entreprise familiale établie sur l’île depuis les années 1950. « Autant pour nous que pour le client, c’était important de faire affaire avec des fournisseurs locaux. L’entrepreneur général qui a travaillé sur le projet est lui aussi établi à Saint-Jean-de-l’Île-d’Orléans », ajoute-t-il.
Tout en faisant honneur à l’architecture caractéristique du territoire où la maison est bâtie, les architectes ont su faire accepter son style contemporain. « Les propriétaires nous ont bien suivis dans cette approche. C’est là ma plus grande satisfaction », conclut Marc Blouin.
EMPLACEMENT : Saint-Jean-de-l’Île-d’Orléans
CLIENTS : France Rodrigue et Hugo Drouin
ARCHITECTES : Blouin Orzes architectes : Marc Blouin, Catherine Orzes
COLLABORATEUR : Julien Landry, stagiaire en architecture
INGÉNIERIE : Structure : Latéral
ENTREPRENEUR : Les Habitations E.S.

Image : Blouin Orzes architectes
Commentaires du jury
Réalisé dans un cadre réglementaire exigeant qui a requis des architectes et du client une persévérance et une puissance de persuasion admirables, ce projet résidentiel s’intègre harmonieusement dans le somptueux paysage de l’île d’Orléans, avec sa silhouette épurée, enveloppée de bois blanc et coiffée de tôle d’acier. Refusant le mimétisme historique, le projet emprunte néanmoins au vocabulaire formel des maisons élevées sur l’île au 18 siècle. Le jury souligne le mérite de cette proposition à la fois originale, contemporaine et respectueuse de son environnement patrimonial, menée à bien dans un contexte hautement contraignant.
Finalistes
La Résidence de l’Isle, Chevalier Morales Architectes
La Maison Hatley, Pelletier de Fontenay/François Abbott
True North, Alain Carle Architecte
Photo : Alex Blouin et Jodi Heartz