Le Studio Jean Verville architectes a réalisé une véritable œuvre d’art en transformant un vieux cottage montréalais en une résidence chaleureuse et fort originale. Un projet qui a su s’adapter aux contraintes financières et structurales pour se bonifier.
Photos : Maxime Brouillet
Lorsque Benjamin Boller et Mathieu Denécheau ont voulu acquérir un domicile dans l’arrondissement du Plateau-Mont-Royal, ils ont vite fait face à un dilemme : payer très cher ou acheter un immeuble en piteux état. Ils ont choisi la deuxième option, y voyant l’occasion de le rénover. Un bon choix, à la lumièredu résultat.
Le Studio Jean Verville architectes a mené ici un projet audacieux en maximisant le budget à sa disposition. En discutant avec les clients, l’architecte a senti leur désir de résider dans un objet singulier et artistique qui sortirait des cadres habituels de l’architecture domestique et qui serait adapté à leur mode de vie.
« Je leur ai présenté l’idée d’habiter dans une sculpture plutôt que dans une maison, et nous avons développé le concept ensemble à partir de cette vision », explique-t-il. Les clients souhaitaient disposer de trois chambres, de deux salles de bain, et ils voulaient beaucoup de lumière. En dehors de ces exigences, ils se montraient très ouverts aux suggestions.
Au départ, certaines pièces du bâtiment étaient surdimensionnées par rapport à leur usage, et l’ensemble était organisé d’une façon un peu aléatoire. Plutôt que de maximiser le nombre de pièces ou leur grandeur, l’architecte a retiré des aires de plancher pour générer une série de volumes ouverts et créer entre eux des interrelations horizontales et verticales.

La chaleur du bois
Des découvertes pendant les travaux ont d’ailleurs permis de pousser cette approche encore plus loin. Construit vers 1905 et rénové dans les années 1980, ce cottage acheté sans inspection préalable réservait en effet quelques surprises.
Par exemple, une rénovation antérieure avait créé un double plafond dont l’état structural laissait à désirer. Après avoir décidé de s’en débarrasser, l’architecte et ses clients ont dû revoir leur projet en partie, mais ils ont gagné presque un mètre de hauteur supplémentaire au deuxième étage. « Chaque défi amenait ainsi une nouvelle opportunité qui bénéficiait au projet, lequel évoluait et se bonifiait constamment », dit l’architecte.
Le choix de finis intérieurs entièrement en bois visait quant à lui plusieurs objectifs. Sur le plan esthétique, cette matière crée un intérieur chaleureux, dont la couleur change au gré de la lumière extérieure qui pénètre par la généreuse fenestration. Ces finis en bois offrent aussi une meilleure durabilité que le gypse. Autre avantage non négligeable : les clients ont pu réaliser eux-mêmes la finition, sans recourir à des équipes professionnelles pour la pose du gypse et la peinture, ce qui a réduit les coûts du projet.
Par ailleurs, plutôt que de remplacer les vieilles briques des façades avant et arrière, le projet mise sur leur réhabilitation. À celles qui étaient trop endommagées, l’architecte a substitué des briques du même type issues d’un ancien projet. L’ensemble a ensuite été recouvert d’un scellant à maçonnerie pour le protéger et en assurer la pérennité. Un bel exemple de réemploi de matériaux qui diminue la quantité de ressources requises ainsi que les frais tout en servant très bien les objectifs esthétiques.

Prendre part au projet
Très satisfait du résultat, Benjamin Boller a aussi beaucoup aimé le processus. « L’architecte nous voyait comme des acteurs du projet, pas seulement comme des clients, affirme-t-il. La parole de tout le monde était respectée, donc nous sentions que nous pouvions émettre nos propositions librement. »
Pour lui, l’une des plus grandes réussites du projet concerne la lumière, qui profite des volumes ouverts et de la double hauteur. « La lumière arrive du rez-de-chaussée et se répand sur les deux étages, ce qui est assez rare dans un duplex, raconte-t-il. Puisque l’intérieur est en bois plutôt que blanc, la luminosité est aussi beaucoup plus chaleureuse. »
Commentaires du jury
Derrière sa discrète façade blanche de brique réutilisée, ce cottage étonne par des agencements de volumes intérieurs uniformément parés de bois qui déjouent les attentes en matière d’habitation. Créer une telle variété avec une palette aussi restreinte de matériaux durables est digne de mention. Résultat d’une démarche complice et minutieuse d’évaluation des besoins et des envies des clients, la conception de cette maison propose une transfiguration des espaces de vie qui repousse les limites de l’architecture résidentielle.
Livraison 2022
Emplacement Montréal
Maîtrise d’ouvrage Benjamin Boller et Mathieu Denécheau
Architecture Studio Jean Verville architectes
Ingénierie Geniex
Autres collaborations Le Pierre rénovation, Ébénisterie CST