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Une collaboration fructueuse entre les architectes et les arpenteurs-géomètres et arpenteures-géomètres est essentielle à la réussite des projets de construction et d’aménagement du terrain. Définies en concertation avec l’Ordre des arpenteurs-géomètres du Québec (OAGQ), les recommandations suivantes sont un rappel des rôles et des responsabilités des professionnelles et professionnels de chacune des disciplines ainsi que des pratiques à considérer pour assurer le bon déroulement des projets.

1. Le certificat de localisation n’est pas toujours le document dont vous avez besoin 

Dès le départ, les architectes ont besoin d’une base fiable pour concevoir leurs projets. Un certificat de localisation peut-il constituer une telle base ? Pas du tout. Le certificat de localisation ne doit en aucun cas être utilisé pour établir les limites d’un fonds sur le terrain ou servir de base à des travaux de construction. Le rôle de ce document consiste principalement à informer les vendeurs et vendeuses, les acheteurs et acheteuses, les notaires et les créanciers lors d’une transaction immobilière.

Au moment de produire un certificat de localisation, l’arpenteur-géomètre ou l’arpenteure-géomètre constate la situation d’un bien immobilier en fonction de divers éléments (documents cadastraux anciens et en vigueur, titres de propriété, marques d’occupation, règlements municipaux et droits réels inscrits au registre foncier). Un peu comme une photographie légale prise à un moment précis, les constats indiqués dans le certificat de localisation sont valables à la date de la production du document. Puisque l’exercice du droit de propriété peut évoluer dans le temps, un certificat émis il y a 10 ans peut, par exemple, ne plus correspondre à la situation actuelle.

Par ailleurs, le certificat de localisation n’illustre pas l’ensemble des enjeux liés à un projet de construction, tels que les contraintes municipales, réglementaires, législatives et topographiques ayant une incidence sur le projet. Il ne contient pas nécessairement toutes les informations relatives à la qualification des limites d’un fonds, qui peuvent être influencées par d’autres facteurs (voir point 2 à la page suivante).

Le certificat de localisation ne doit donc jamais servir de plan de référence pour l’implantation des bâtiments, et ce, pour deux raisons : d’abord, parce que ce n’est pas son rôle et, ensuite, parce qu’il ne fournit pas les nuances et la précision requises pour entamer une conception architecturale. Son utilisation à cette fin pourrait engendrer des problèmes sur le chantier. 

C’est plutôt le plan de localisation et, si requis, le plan topographique qui constituent les bons documents servant d’assise à la conception architecturale d’un projet. Ils doivent être préparés par un membre de l’OAGQ. Le plan projet d’implantation ainsi que le certificat d’implantation, quant à eux, pourront être produits lorsque la conception du projet sera terminée et pourront servir à la construction.

2. La qualification des limites d’un fonds  doit être déterminée par l’arpenteur-géomètre  ou l’arpenteure-géomètre

Les limites d’un fonds (communément appelées « limites de propriété » ou « lignes de lot » par les architectes2) sont parfois confondues avec les limites cadastrales indiquées sur le plan du cadastre du Québec, disponible en ligne. L’architecte ne peut se fier à ces limites cadastrales et juger qu’elles correspondent aux limites d’un fonds.

Selon la Loi sur les arpenteurs-géomètres, le positionnement des limites d’un fonds est l’expertise exclusive des arpenteurs-géomètres et arpenteures-géomètres. Cela nécessite de prendre en compte les données mathématiques de même que le droit foncier. L’arpenteur-géomètre ou l’arpenteure-géomètre établit son opinion sur la base d’une analyse foncière qui tient compte de différents éléments, tels que les repères physiques existants (repères d’arpentage, bornes, clôtures, murs, etc.), les titres de propriété, les documents cadastraux, les marques d’occupation présentes sur les lieux, et autres indices et documents utiles, s’il y a lieu. 

Des incertitudes, parfois dues à l’évolution du lieu, peuvent influer sur le positionnement d’une limite d’un fonds. Il en va de même pour les données mathématiques indiquées sur les documents en vigueur qui peuvent ne pas être transposables sur les lieux avec exactitude. Des éléments comme la prescription acquisitive (une occupation prolongée par un voisin ou une voisine) peuvent par exemple influencer légalement la position d’une limite.

La qualification des limites d’un fonds est une réalité plus complexe qu’un simple trait sur un plan. Elle doit être prise en charge par un arpenteur-géomètre ou une arpenteure-géomètre dès le début du projet, puisque ces limites sont souvent parmi les premières contraintes d’un projet de construction.

3. Attention aux dimensions indiquées  aux plans d’architecture !

Il est recommandé de laisser aux arpenteurs-géomètres et arpenteures-géomètres le soin d’indiquer à leur plan projet d’implantation, voire au certificat d’implantation, les mesures (communément appelées « cotes ») entre le bâtiment projeté et les limites d’un fonds. Sur les plans d’architecture, si une approximation de ces mesures est indiquée, une mise en garde précisant que « ces mesures sont indicatives, et ce plan ne peut se substituer à un plan d’arpentage officiel » devrait être ajoutée. 

De plus, si des dimensions indiquées au plan d’architecture proviennent d’un document d’arpenteur-géomètre ou arpenteure-géomètre, l’architecte doit s’assurer d’avoir obtenu l’autorisation de l’auteur ou autrice et le préciser dans une note. Le certificat de localisation est un document protégé par le droit d’auteur, tout comme le plan d’architecture.

Les plans d’architecture peuvent référencer le travail de l’arpenteur-géomètre ou arpenteure-géomètre en indiquant les coordonnées du document d’arpentage (nom, minute et numéro de dossier). C’est une pratique prudente qui assure une cohérence des informations et peut éviter des problèmes lors de la construction.

Si les mesures indiquées au plan d’architecture ne proviennent pas  d’un arpenteur-géomètre ou une arpenteure-géomètre, mais ont plutôt été extraites d’un plan cadastral disponible en ligne, il faut préciser qu’il s’agit de limites cadastrales et une note spécifique au plan devrait en fournir la source.

4. Intégrer une tolérance  aux marges minimales exigées

Il arrive que des architectes positionnent les bâtiments projetés directement sur les limites des marges minimales exigées. Pour les arpenteurs-géomètres et arpenteures-géomètres, cela demeure préoccupant. Bien que cette approche maximise la superficie de l’immeuble, il ne faut pas négliger certaines réalités du positionnement de la limite d’un fonds, de même que celles inhérentes à tout chantier :

•  Des incertitudes peuvent influer sur le positionnement  d’une limite d’un fonds;

•  Des écarts de construction, même minimes, peuvent survenir et entraîner une non-conformité; 

•  Une implantation sans marge sécuritaire peut causer des litiges avec les municipalités et entraîner des ajustements coûteux, voire la démolition.

Les arpenteurs-géomètres et arpenteures-géomètres recommandent qu’on communique avec eux afin de déterminer les tolérances à appliquer aux marges. L’ampleur de ces tolérances est à déterminer en fonction des particularités du terrain, de la certitude du positionnement des limites et des contraintes imposées au projet.

5. Collaborer dès le démarrage du projet

On remarque que les exigences des municipalités en matière d’implantation des nouvelles constructions ont évolué au cours des dernières années, ce qui peut ajouter à la complexité de l’exercice.

En vue de l’approbation des projets de construction, certaines municipalités demandent de recevoir des informations supplémentaires qui ne se trouvent pas sur les certificats de localisation et qui nécessitent des opérations d’arpentage. Pensons aux pentes et aux élévations du terrain ou à l’inventaire des arbres qui s’y trouvent, par exemple. Hydro-Québec, de son côté, peut exiger un dégagement minimal entre les fils aériens et le bâtiment à construire.

Ces données doivent être considérées dès le début du projet puisqu’elles peuvent constituer des contraintes à la conception. L’architecte a donc avantage à collaborer avec l’arpenteur-géomètre ou l’arpenteure-géomètre afin que tout le monde soit bien au fait des informations requises dans le cadre du projet. De cette façon, ce dernier ou cette dernière pourra adapter ses services professionnels en fonction de ces exigences et mieux soutenir l’architecte et ses clients et clientes.

Il est recommandé de tenir le plus tôt possible une réunion avec les différents intervenants et intervenantes, dont l’arpenteur-géomètre ou arpenteure-géomètre, et ce, pour plusieurs raisons :

•  S’assurer que tout le monde est au courant des exigences municipales et des réalités foncières;

•  Clarifier les exigences techniques du projet et les enjeux propres au dossier;

•  Identifier les besoins en arpentage afin que l’arpenteur-géomètre ou arpenteure-géomètre puisse fournir des documents adaptés aux objectifs des architectes et des autres parties participant au dossier (ingénieurs, ingénieures, municipalités, etc.).

Comme dans bien des situations, une bonne communication entre professionnels et professionnelles est une recette gagnante. Elle permet notamment de réduire les risques d’erreurs et d’omissions et d’éviter les retards et d’éventuels litiges. Tout cela participe à la réussite du projet et à la satisfaction du client ou de la cliente qu’ils ou elles ont en commun.  

Quelques définitions utiles

Certificat de localisation : « […] document en minute comportant un rapport et un plan, dans lequel l’arpenteur-géomètre exprime son opinion sur la situation et la condition actuelles d’un bien-fonds par rapport aux titres de propriété, au cadastre, ainsi qu’aux lois et règlements pouvant l’affecter. Il ne peut être utilisé ou invoqué à des fins autres que celles auxquelles il est destiné.3 » C’est « l’état de santé » d’un immeuble et un document complémentaire aux titres de propriété. Il est utile autant à l’investisseur, au ou à la propriétaire et aux tribunaux qu’aux municipalités.

Plan topographique : document indiquant les bâtiments existants, les cours et les plans d’eau, les routes, la végétation, les aménagements paysagers et les courbes de niveau du sol.

Plan de localisation : plan sur lequel l’arpenteur-géomètre exprime son opinion sur la situation et la condition actuelles d’un bien-fonds par rapport aux titres de propriété, au cadastre ainsi qu’aux lois et règlements pouvant l’affecter. Il indique également la position des constructions présentes sur les lieux par rapport aux limites d’un fonds4

Plan projet d’implantation : plan sur lequel l’arpenteur-géomètre indique la position de la construction projetée par rapport aux limites d’un fonds.

Certificat d’implantation : « Le certificat d’implantation est une confirmation écrite de l’exécution de l’implantation, sous forme d’un plan accompagné ou non d’un rapport, délivrée par l’arpenteur-géomètre à l’intention du client ou de son mandant.5 »

Implantation : « Ensemble des opérations d’arpentage effectuées par l’arpenteur-géomètre dans le but de positionner et de matérialiser par des marques le site exact d’une structure ou d’un détail de structure à être érigée ou modifiée, relativement aux limites d’un bien-fonds, à une autre structure existante ou à d’autres lignes de référence.6 »

Limites d’un fonds : « Les limites d’un fonds sont déterminées par les titres, les plans cadastraux et la démarcation du terrain et, au besoin, par tous autres indices ou documents utiles.7 »

Limites cadastrales : les limites indiquées sur un plan cadastral.8

1    Auteurs : Frédéric Belleville, a.-g., et Nathalie Massé, a.-g., Ph. D., Ordre des arpenteurs-géomètres du Québec. L’OAGQ et l’OAQ ont collaboré à la rédaction  de cet article. La version à l’intention des arpenteurs-géomètres et arpenteures-géomètres paraît dans le volume 52, numéro 2 : Automne-hiver 2025, de la revue Géomatique.
2    L’article 977 du Code civil du Québec utilise le vocable « limite d’un fonds »  alors que « limite de propriété » ne s’y trouve pas.
3    Règlement sur la norme de pratique relative au certificat de localisation,  RLRQ c. A-23, r. 10
4   OAGQ
5    OAGQ
6   OAGQ
7    Article 977 du Code civil du Québec, RLRQ c. CCQ-1991
8    OAGQ